Employeurs : une nouvelle obligation d'entretien avec vos salariés tous les deux ans

  • Article publié le 17 mars 2014

Les employeurs sont désormais tenus d’organiser, au moins tous les deux ans, un entretien avec chacun de leurs salariés, afin de discuter de leurs perspectives d'évolution professionnelle. Cette nouvelle obligation, qui concerne toutes les entreprises, petites ou grandes, est issue de la récente loi sur la formation professionnelle.

La loi relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a été promulguée le 6 mars dernier.

Parmi les mesures qu'elle contient, bon nombre n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2015. Nous y reviendrons donc d'ici là, au fur et à mesure de la parution des décrets d'application. Citons notamment :

  • La création d'un « Compte Personnel de Formation », que l'on appelle déjà le CPF et qui est destiné à remplacer l'actuel DIF (Droit Individuel à la Formation). Ce compte sera ouvert à partir du 1er janvier 2015 pour toute personne âgée d'au moins 16 ans (15 ans en cas d'apprentissage), et il la suivra tout au long de sa vie, jusqu'à ce qu'elle ait fait valoir l'ensemble de ses droits à la retraite. Il permettra de comptabiliser les droits à formation acquis : 24 heures par année de travail salarié jusqu’à l’acquisition d’un crédit de 120 heures, puis 12 heures par année de travail jusqu’à une limite de 150 heures. Le plafond est donc atteint au bout de 7 ans et demi. L'avantage par rapport au DIF est que ce compte ne sera pas impacté en cas de changement de situation professionnelle ou de perte d’emploi puisque le titulaire conservera les heures inscrites sur le compte tout au long de sa vie professionnelle.
  • La création d'une nouvelle cotisation patronale, dont le taux sera compris entre 0,014 % et 0,020 % des salaires bruts, et qui sera destinée au financement des syndicats.
  • La mise en place de simplifications au niveau de la collecte des contributions formation (création d'une cotisation unique au lieu de trois ou quatre aujourd'hui).

Mais pour l'heure, arrêtons-nous à une mesure qui entre en vigueur dès maintenant, à savoir la création d'une nouvelle obligation d'entretien professionnel avec les salariés.

Nouvelle obligation d'entretien professionnel biennal

Désormais, tous les salariés devront bénéficier d'un entretien professionnel avec leur employeur tous les deux ans à partir de la date de leur embauche.

En outre, tout nouveau salarié accueilli dans l'entreprise à partir du 7 mars 2014 doit être informé, à l'occasion de son embauche « qu'il bénéficie tous les deux ans d'un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d'emploi ».

Nota : la loi n'apporte aucune précision sur les modalités pratiques de cette information. Devra-t-elle faire l'objet d'une mention dans le contrat de travail ? L'Administration publiera sans doute des informations à ce sujet ultérieurement.

Cette nouvelle obligation d'entretien professionnel biennal s'applique dans toutes les entreprises, quels que soient leur activité et le nombre de leurs salariés.

L'entretien doit en outre bénéficier à tous les salariés, sans condition de statut (cadre ou non cadre par exemple), ni d'ancienneté, et quel que soit la nature de leur contrat de travail : CDD, CDI, à temps plein ou à temps partiel, etc.

Par ailleurs, le même entretien doit désormais être systématiquement proposé à tout salarié qui reprend son activité à l'issue :

  • d'un congé de maternité ;
  • d'un congé parental d'éducation (à temps plein ou à temps partiel) ;
  • d'un congé de soutien familial ;
  • d'un congé d'adoption ;
  • d'un congé sabbatique ;
  • d'une période de mobilité volante sécurisée ;
  • d'un arrêt longue maladie ;
  • d'un mandat syndical.
     

Ce nouvel entretien obligatoire se substitue aux entretiens qui étaient prévus jusqu'ici au retour d'un congé de maternité, de soutien familial ou d'un congé parental d'éducation, ainsi qu'à l'entretien de seconde partie de carrière, qui devait être fait à partir de 45 ans.

Objet de l'entretien et document à établir

Selon la loi, cet entretien ne devra pas porter sur l'évaluation du travail du salarié, mais uniquement sur les perspectives d'évolution professionnelle de celui-ci, notamment en termes de qualifications et d'emploi.

Par ailleurs, chaque entretien professionnel devra donner lieu à la rédaction d'un "document", dont une copie devra être remise au salarié.

Nota : ce terme de "document" est bien évidemment assez vague. Lors des débats parlementaires, il a été précisé qu'il pouvit s'agir d'un simple compte rendu attestant que l'entretien s'est bien tenu. Mais là encore, des précisions administratives seront les bienvenues.

Bilan obligatoire tous les six ans

Tous les six ans, à compter de la date d'embauche du salarié, il devra être fait au cours de cet entretien professionnel un "état des lieux" récapitulatif du parcours professionnel du salarié.

Là encore, celui-ci devra donner  lieu à la rédaction d'un document dont une copie devra être remise au salarié, et il aura pour objet, non seulement de vérifier que le salarié a bénéficié au cours des six dernières années des entretiens professionnels auxquels il avait droit tous les deux ans, mais aussi d'apprécier s'il a :

  1. Suivi au moins une action de formation ;
  2. Acquis des éléments de certification par la formation ou par une validation des acquis de son expérience ;
  3. Bénéficié d'une progression salariale ou professionnelle.
     
Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, si le salarié n'a pas bénéficié de ses entretiens professionnels et d'au moins deux des trois mesures d'évolution professionnelle énumérée ci-dessus, il aura droit, dans des conditions qui seront définies par un décret, à un crédit de 100 heures supplémentaires, s'il est à temps plein, ou de 130 heures s'il est à temps partiel.

Quid des salariés actuellement en poste ?

Cette nouvelle obligation d'entretiens professionnels biennaux doit bénéficier à tous les salariés de l'entreprise, quelle que soit leur ancienneté, et y compris par conséquent aux salariés actuellement en poste dans votre entreprise.

Cependant, la loi n'apportant aucune précision sur les modalités de mise en œuvre de cette mesure pour ces derniers, de nombreuses questions restent en suspens, notamment en ce qui concerne le calendrier d'organisation des entretiens. Des précisions devraient être apportées à ce sujet par l'Administration et nous ne manquerons pas de vous les faire connaître dès leur parution.

Source : Article 5 de la Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014, J.O. du 6.

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