Nouveau : si vous vendez votre société ou votre fonds de commerce, les salariés doivent en être informés au préalable

  • Article publié le 1 sept. 2014

La loi a été promulguée au beau milieu de l'été. Désormais, la cession d'un fonds de commerce, d'une société, ou même d'une simple participation majoritaire dans le capital, doit au préalable être signifiée aux salariés afin de leur permettre de faire une offre de rachat.

Ce n'est plus un secret pour personne, des centaines de milliers d'entreprises seront à vendre d'ici les 15 prochaines années et il est malheureusement acquis que bon nombre d'entre elles ne trouveront pas de repreneurs.

Ce sont autant de savoir-faire et d'emplois qui risquent de disparaître et c'est dans ce contexte que le Gouvernement considère que la reprise par les salariés peut représenter une solution.

D'où cette  nouvelle loi promulguée cet été. Plus précisément, ces nouvelles dispositions sont contenues dans deux articles de la loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, dite « Loi Hamon ».

Principe général

Désormais, la cession par son propriétaire d'un fonds de commerce ou d'une participation donnant accès à la majorité du capital d'une société (plus de 50 % des parts dans une SARL), doit être signalée aux salariés, et ce au plus tard deux mois avant la cession, afin de permettre à un ou plusieurs d'entre eux de présenter une offre pour l'acquisition de ce fonds ou de ces parts sociales.

Il appartient à cet égard au propriétaire du fonds, s'il s'agit de la cession d'un fonds de commerce, ou au Gérant de la SARL, s'il s'agit d'une cession de la majorité des parts, de porter sans délai à la connaissance des salariés le projet de cession, tout en les informant qu'ils peuvent présenter une offre de rachat au cédant.

Nota : lorsque le propriétaire du fonds n'en est pas l'exploitant, le projet de cession doit être notifié à ce dernier, et le délai court à compter de la date de cette notification. L'exploitant du fonds doit alors porter sans délai à la connaissance des salariés cette notification, en les informant qu'ils peuvent présenter au cédant une offre de rachat.

Dans les entreprises de moins de 50 salariés, lesquelles sont normalement dépourvues de comité d'entreprise, cette information des salariés peut être effectuée, selon les termes de la loi, "par tout moyen de nature à rendre certaine la date de sa réception par ces derniers". Un décret à paraître apportera toutefois des précisions à cet égard.

Même chose dans les entreprises de 50 à 250 salariés, sauf que, dans ce cas, le comité d'entreprise doit également être informé.

Confidentialité

Parallèlement, les salariés sont tenus à une obligation de discrétion s'agissant des informations reçues, sauf à l'égard des personnes dont le concours est nécessaire pour leur permettre de présenter au cédant une offre de rachat.

Nota : à leur demande, les salariés peuvent en effet se faire assister par un représentant de la chambre de commerce, de la chambre régionale d'agriculture, ou de la chambre régionale de métiers et de l'artisanat territorialement compétentes, en lien avec les chambres régionales de l'économie sociale et solidaire, et par toute personne désignée par eux, dans des conditions qui doivent être définies par décret.

Sociétés dans lesquelles les associés doivent posséder une certaine qualification professionnelle (SELARL notamment)

Les dispositions ci-dessus seront applicables de la même manière à la cession d'une participation majoritaire dans une société soumise à une réglementation particulière prescrivant que tout ou partie de son capital soit détenu par un ou plusieurs associés répondant à certaines conditions en termes notamment de qualification professionnelle, mais sous réserve toutefois :

  • soit qu'un au moins des salariés pouvant présenter l'offre d'achat remplisse les conditions requises ;
  • soit que la cession ne porte pas sur la partie du capital soumise à la règlementation et détenue par l'associé répondant aux conditions requises.

Cessions non soumises à cette obligation d'information

L'obligation d'information des salariés n'est pas applicable :

  1. En cas de succession, de liquidation du régime matrimonial ou de cession du fonds ou des parts sociales à un conjoint, à un ascendant ou à un descendant ;
  2. Aux sociétés faisant l'objet d'une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires.
  3. Aux sociétés qui dépassent, à la clôture d'un exercice social, les seuils définissant les PME, notamment celles qui comptent plus de 250 salariés.

Suites de l'information donnée aux salariés

Ce nouveau droit offert aux salariés ne remet pas en cause le patrimoine du cédant. Ce dernier reste libre de vendre au prix qu'il souhaite et à qui il veut en cas d'offre tierce plus intéressante.

Par ailleurs, la négociation doit s'effectuer de gré à gré et respecter les règles de confidentialité propres au droit commercial.

De plus, la cession peut intervenir avant l'expiration du délai de deux mois dès lors que chaque salarié a fait connaître au cédant sa décision de ne pas présenter d'offre.

Par contre, si la cession n'est pas intervenue dans un délai maximal de deux ans après l'expiration du délai de deux mois laissé aux salariés pour faire une offre, ces derniers devront à nouveau être informés du projet de cession (si celui-ci est toujours d'actualité bien entendu).

Sanctions

Toute cession qui interviendra en méconnaissance de cette obligation d'information des salariés, lorsqu'elle trouvera à s'appliquer, pourra être annulée par la juridiction civile ou commerciale compétente sur demande des salariés, et cette action en nullité pourra être exercée pendant deux mois à compter de la date de publication de la cession ou de la date à laquelle les salariés en auront été informés.

Entrée en vigueur

Selon le législateur, ces nouvelles dispositions s'appliqueront « aux cessions conclues trois mois au moins après la date de publication de la loi », soit, la loi ayant été publiée le 1er août dernier, aux cessions conclues à compter du 1er novembre 2014.

En d'autres termes, pour une cession qui doit intervenir en novembre prochain, les salariés doivent normalement être informés dès ce mois de septembre.

Source : Articles 19, 20 et 98 de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014, J.O. du 1er août.