En effet, même si la révocation n'entraîne aucun préjudice financier, elle peut entraîner un préjudice moral.
La mésentente entre cogérants peut-elle justifier la révocation de l'un d'eux ?
- Article publié le 18 avr. 2014
Un cogérant peut être révoqué à tout moment, mais encore faut-il, comme pour un Gérant unique, que ce soit pour un juste motif. L'impossibilité de gérer ensemble la société, pour cause de mésentente, constitue-t-elle ce juste motif ? La Cour de cassation répond...
L'affaire
Deux cogérants étaient à couteaux tirés. Ils reconnaissaient eux-mêmes « qu'ils ne pouvaient plus s'entendre et gérer ensemble la société ». En conséquence, les associés avaient décidé, au cours d'une assemblée générale, de procéder à la révocation immédiate de l'un deux.
Mais ce dernier ne l'entend pas de cette oreille, sollicite des dommages et intérêts pour révocation sans juste motif et obtient gain de cause (46.000 €) devant la Cour d'appel.
La société forme alors un pourvoi en cassation, considérant que la mésentente entre les cogérants mettait en péril son fonctionnement et constituait par conséquent un juste motif de révocation.
La Cour de cassation
Les juges de la haute cour considèrent quand à eux - et il s'agit là d'une jurisprudence constante -, que la mésentente entre associés ne constitue un juste motif de révocation qu'à la condition qu'elle compromette le fonctionnement de la société.
Or, en l'espèce, il n'a pas été constaté que la gestion de la société était devenue impossible, et il n'a pas été démontré que la mésentente entre les gérants avait pu compromettre le fonctionnement de celle-ci.
En conséquence, le pourvoi est rejeté.
Conclusion
Il ne faut pas confondre dysfonctionnements et paralysie. Même si, dans cette affaire, la mésentente entre les cogérants pouvait être considérée comme néfaste pour le développement de la SARL, celle-ci n'en continuait pas moins de fonctionner.
Au lieu de penser immédiatement à la révocation, le premier réflexe à avoir, en cas de mésentente, est d'adresser une ou plusieurs lettres recommandées motivées à son cogérant, puis de faire noter le désaccord à la prochaine assemblée générale.
Ensuite si aucune solution ne se dessine, un des deux cogérants, à condition qu'il soit lui-même associé, peut saisir le Tribunal de Commerce, par requête en référé, afin d'obtenir la désignation d'un mandataire chargé de les réunir et de trouver une solution au problème.
En général, le Tribunal nomme un professionnel du droit des affaires (mandataire judiciaire ou avocat) expérimenté en la matière qui convoquera les parties.
Après plusieurs réunions, il pourra établir un protocole d'accord si les cogérants ont réussi à se mettre d'accord.
Si en revanche aucune solution n'est trouvée, il rédigera un rapport à l'attention du Tribunal et proposera éventuellement la dissolution de la société.