Exonération des heures supplémentaires : 20 questions-réponses

  • Article publié le 16 avr. 2019

Depuis le 1er janvier 2019, les heures supplémentaires et complémentaires bénéficient d’une exonération des cotisations salariales d’assurance vieillesse. Sous forme de questions-réponses, la Direction de la Sécurité sociale vient de préciser les principales modalités d’application de cette mesure.

Eligibilité au dispositif

Quelles heures supplémentaires et complémentaires sont éligibles à l’exonération ?

Pour les salariés à temps plein, les heures éligibles sont les heures supplémentaires, c’est-à-dire celles effectuées au-delà de la durée légale du travail, soit 35 heures hebdomadaires, ou de la durée considérée comme équivalente dans certaines professions.

Nota : le régime d’équivalence, défini à l’art. L. 3121-13 du code du travail, constitue un mode spécifique de détermination du temps de travail effectif, comportant des périodes d’inaction, et de sa rémunération, pour des professions et des emplois déterminés.

Pour les salariés à temps partiel, les heures complémentaires, c’est-à-dire celles effectuées en plus de celles inscrites au contrat de travail sont également éligibles.

Par ailleurs, sont également éligibles les heures supplémentaires effectuées dans le cadre d’un dispositif d’aménagement du temps de travail ou d’anciens dispositifs comme la modulation, les jours de RTT ou les cycles de travail, ainsi que les heures supplémentaires effectuées dans le cadre d’une convention de forfait en heures (qu’il s’agisse des heures incluses dans le forfait ou des heures effectuées au-delà).

Par contres, les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours sur l’année ne peuvent pas effectuer d’heures supplémentaires, mais ils peuvent bénéficier de l’exonération au titre des jours de repos auxquels ils renoncent en contrepartie d’une majoration de leur rémunération, au-delà de 218 jours par an.

Dans quelles conditions les heures sont-elles éligibles à l’exonération lorsque leur période de comptabilisation a commencé en 2018 et s’est achevée en  2019 ?

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoit que les heures supplémentaires dont la rémunération est exonérée doivent avoir été réalisées à compter de 2019.

Par ailleurs, le droit commun prévoit, pour déterminer le nombre d’heures supplémentaires ou complémentaires réalisé, un décompte hebdomadaire (le plus souvent dans le cadre de la semaine civile mais il peut s’agir de toute autre période de 7 jours consécutifs).

Toutefois, par dérogation, plusieurs modalités d’organisation de la durée de travail prévoient que le décompte des heures réalisées est effectué sur une période supérieure à la semaine (annualisation du temps de travail, forfaits annuels, accords de modulation...).

L’exonération est appliquée à l’ensemble des heures décomptées en 2019, y compris si des heures supplémentaires sont décomptées à l’issue d’une période de référence commencée en 2018 et achevée en 2019.

En particulier, si la période de décompte est hebdomadaire, l’ensemble des heures supplémentaires ou complémentaires réalisées sur la semaine du lundi 31 décembre 2018 au dimanche 6 décembre 2019 sont éligibles à l’exonération.

Exemple : pour un salarié soumis à un accord d’aménagement du temps de travail sur une période de référence de 12 semaines, la dernière période de l’année civile allant du lundi 19 novembre 2018 au dimanche 10 février 2019, si 21 heures supplémentaires sont décomptées à l’issue de cette période, la totalité de ces 21 heures bénéficient de l’exonération.

Les heures supplémentaires payées dans le cadre de « rappels de paie » début 2019 au titre d’heures réalisées en 2018 sont-elles éligibles à l’exonération ?

NON. Les rémunérations dues au titre des heures supplémentaires peuvent faire l’objet, en pratique de « rappels de paie » au cours des mois suivants, soit que l’employeur pratique de manière habituelle le décalage de paye pour le paiement de certains éléments variables de la rémunération, soit qu’il s’agisse de la correction d’une erreur de paie.

Mais conformément aux règles sur le fait générateur des cotisations et contributions de sécurité sociale, les rémunérations des heures en question ne peuvent pas bénéficier de l’exonération si elles sont payées au salarié en 2019 mais que la période de décompte des heures s’est achevée avant le 1er janvier.

Les heures supplémentaires « structurelles » sont-elles prises en compte et dans quelles conditions ?

OUI. Les heures supplémentaires dites « structurelles » résultent soit d’une durée collective de travail supérieure à la durée légale, soit d’une convention individuelle de forfait en heures (forfait hebdomadaire, mensuel ou annuel) intégrant un certain nombre d’heures supplémentaires.

Elles bénéficient de l’exonération dans les mêmes conditions que les autres heures supplémentaires.

En cas d’absence du salarié donnant lieu à maintien de la rémunération, les heures supplémentaires « structurelles » de la période sont réputées réalisées et donnent lieu à exonération.

En cas d’absence du salarié partiellement rémunérée ou non rémunérée, la rémunération des heures supplémentaires « structurelles » est prise en compte dans les mêmes conditions que pour le calcul de la réduction générale, soit après application d’un coefficient d’absence correspondant au rapport entre la rémunération versée et celle qui aurait dû être versée si le salarié n’avait pas été absent.

Les heures « de complément » définies par avenant au contrat de travail pour les salariés à temps partiel sont-elles éligibles à l’exonération  ?

NON. Ces heures prévues au contrat ne constituent pas des heures complémentaires et ne bénéficient donc pas de l’exonération. En effet, elles sont inscrites par avenant au contrat de travail ; elles ne sont d’ailleurs pas nécessairement associées à une majoration salariale.

Les heures effectuées dans le cadre du dispositif du temps partiel modulé sont-elles éligibles à l’exonération  ?

NON. L’application du dispositif de modulation du temps de travail permet aux salariés à temps partiel d’effectuer, sur une période définie, un nombre d’heures supérieur à celui inscrit à leur contrat de travail. Mais ces heures n’ont pas la qualification d’heures complémentaires et ne peuvent donc bénéficier de l’exonération.

En effet, le dispositif prévoit que si le nombre d’heures effectuées certaines semaines excède ce qui est prévu par le contrat de travail, cela doit être compensé par un nombre d’heures inférieur effectué les semaines suivantes. Si, à la fin de la période, le nombre d’heure est toujours supérieur à ce qui est prévu par le contrat de travail, il doit être proposé au salarié de majorer le nombre d’heures inscrites à son contrat.

Que le salarié accepte ou refuse la modification de sa durée de travail contractuelle est sans incidence sur la qualification des heures accomplies au-delà de la durée de travail inscrite initialement au contrat, qui ne sont pas associés à une obligation de majoration salariale et ne bénéficient donc pas du statut d’heures complémentaires.

Les heures incluses dans les conventions de forfait donnent elles lieu à une exonération ? Le cas échéant, dans quelles conditions ?

OUI. Les heures supplémentaires incluses dans les conventions de forfait en heures sont éligibles à l’exonération.

Il s’agit des heures prévues au-delà la durée légale de travail rapportée sur la période de référence (soit 151,67 heures si le forfait est mensuel et 1.607 heures si le forfait est annuel).

La rémunération du salarié ayant conclu une convention de forfait étant, par définition, forfaitaire et non horaire, une rémunération horaire doit être définie à partir de la rémunération globale et en tenant compte de la majoration de rémunération dont bénéficient les heures supplémentaires incluses dans celui-ci.

La rémunération des heures réalisées au-delà de la durée légale correspond au rapport entre d’une part le nombre d’heures effectuées, pour la détermination duquel le nombre d’heures supplémentaires est majoré d’un facteur égal à la majoration salariale applicable, et d’autre part la rémunération totale.

Exemple : pour un salarié ayant un forfait de 175 heures par mois, rémunéré 2 700 € par mois, le forfait représente une durée de travail supérieure de 23,33 heures à la durée légale. Sauf taux conventionnel différent, la majoration des heures supplémentaires est de 25 % (pour les 8 premières heures supplémentaires par semaine). Après pondération d’un facteur 1,25 pour ces 23,33 heures supplémentaires, la « durée totale de travail » prise en compte est donc de 151,67 + 23,33 x 1,25 = 180,83 heures et la rémunération horaire correspondante de 2 700 / 180,83 = 14,93 €. La rémunération des heures supplémentaires à retenir pour le calcul de l’exonération s’élève donc à 23,33 x 14,93 x 1,25 = 435,40 €.

L’exonération est-elle applicable aux heures qui donnent lieu à la fois à majoration salariale et à la prise d’un repos compensateur de remplacement ?

OUI. Une heure supplémentaire peut être soit compensée intégralement par majoration salariale, soit compensée intégralement en repos, soit compensée pour partie par majoration salariale et pour partie en repos.

L’exonération est applicable dès qu’une majoration salariale intervient au titre d’une heure supplémentaire et complémentaire.

Cependant, elle ne s’applique pas, le cas échéant, sur la partie de l’heure qui n’est pas compensée par majoration salariale.

Par ailleurs, le fait que la compensation en repos soit placée sur un compte épargne-temps (CET), puis monétisée par la suite, ne permet pas que cette monétisation puisse bénéficier de l’exonération.

Calcul de la réduction de charges sur les heures supplémentaires

Quelle rémunération horaire doit être prise en compte pour le calcul de la majoration salariale applicable aux heures supplémentaires ou complémentaires et dans quelles conditions cette majoration est-elle prise en compte pour le calcul de l’exonération  ?

La majoration est calculée selon les règles prévues par le droit du travail, c’est-à-dire en ajoutant au salaire horaire effectif les éventuelles primes et indemnités ayant le caractère d’un salaire, ainsi que les avantages en nature.

Les primes à prendre en compte sont les primes inhérentes à la nature du travail (primes de danger, de d’insalubrité, de froid, de rendement...).

En revanche, les primes non inhérentes à la nature du travail ou les primes qui n’ont pas la nature d’un élément de rémunération mais constituent un remboursement de frais particuliers ne sont pas prises en compte.

Ainsi, sont notamment exclues de la base de calcul les primes d’ancienneté.

Le taux de majoration à retenir est celui prévu par la convention collective ou un accord d'entreprise. A défaut, on retient le taux légal, à savoir :

  • pour les heures supplémentaires : 25 % pour les 8 premières heures hebdomadaires et 50 % pour les suivantes,
  • pour les heures complémentaires : 10 % pour celles n’excédant pas 1/10 des heures prévues au contrat et 25 % pour les autres.

Une prime dont le montant serait basé sur le temps de travail du salarié peut-elle bénéficier de l’exonération au titre de la majoration de prime liée aux heures supplémentaires ou complémentaires effectuées ?

NON. La prime qui ne constitue pas un élément de rémunération des heures supplémentaires ou complémentaires ne peut être incluse, totalement ou partiellement, dans l’assiette de rémunération bénéficiant de l’exonération.

Quel est le taux d’exonération à appliquer ?

Le taux d’exonération est égal à la somme des taux de chacune des cotisations salariales d’assurance vieillesse dues par le salarié.

Toutefois, ce taux ne peut être supérieur à 11,31 %, lequel correspond à la somme des taux de cotisations applicables dans le cas général pour une rémunération inférieure au plafond de la sécurité sociale, soit 7,3 % d’assurance vieillesse de base, et 4,01 % au titre des cotisations d’assurance vieillesse complémentaire.

Les cotisations pour la prévoyance complémentaire peuvent-elles être prise en compte pour la détermination du taux d’exonération  ?

NON. Seules les cotisations d’assurance vieillesse rendues obligatoires par la loi, de base et complémentaire, doivent être prises en compte dans le taux d’exonération.

Comment déterminer le taux d’exonération pour la part des rémunérations supérieures au plafond de la sécurité sociale ?

Lorsque la rémunération excède le plafond de la sécurité sociale, la rémunération versée au titre des heures supplémentaires est exonérée de cotisations salariales à hauteur des cotisations dues, dans la limite de 11,31 %.

Toutefois, dans la mesure où les taux de cotisations salariales d’assurance vieillesse ne sont pas identiques pour la part de la rémunération inférieure et la part de la rémunération excédant le plafond, il convient de calculer l’exonération en fonction du taux moyen de cotisations salariales d’assurance vieillesse applicable sur l’ensemble de la rémunération.

Ce taux moyen peut être calculé en rapportant le montant total des cotisations salariales d’assurance vieillesse dues au titre de l’ensemble de la rémunération, y compris celle afférente aux des heures supplémentaires, à cette même rémunération. Le taux est si nécessaire limité à 11,31 %.

Exemple : pour un salarié rémunéré 5.285,71 € par mois (soit un niveau supérieur au plafond de la sécurité sociale), dont 1.285,71 € est lié à la réalisation de 9 heures supplémentaires et assujetti sur cette rémunération uniquement à la cotisation d’assurance vieillesse de base et aux cotisation d’assurance vieillesse complémentaires dues à l’AGIRC-ARRCO, le montant des cotisations salariales dues est égal à 583,56 €, dont 387,34 € pour la partie de la rémunération inférieure au plafond de la sécurité sociale (soit un taux de cotisation effectif de 11,47 %) et 196,22 € pour la partie de la rémunération supérieure à ce plafond (soit un taux de cotisation effectif de 10,28 %). Le taux moyen effectif de cotisation est donc de 583,56 / 5.285,71 = 11,04 %. C’est ce taux qui est appliqué à la rémunération des heures supplémentaires pour déterminer le montant de l’allègement.

Comment l’exonération s’articule-t-elle avec l’exonération de cotisations salariales dont bénéficient les apprentis ?

Lorsque la rémunération de l’apprenti est inférieure à 79 % du SMIC, aucune cotisation salariale n’est due.

Lorsque cette rémunération est supérieure à 79 % du SMIC, si des heures supplémentaires sont réalisées, l’exonération au titre de ces heures s’applique uniquement sur la part de rémunération supérieure à 79 % du SMIC, à proportion de la part de la rémunération au titre de ces heures supplémentaires dans le total de la rémunération.

Exemple : pour un apprenti rémunéré à 85 % du SMIC, soit 1 293,06 € sur un mois, ayant réalisé au cours du mois 160,67 heures, dont 9 heures supplémentaires dont la rémunération est majorée de 25 %, la rémunération des heures supplémentaires représente (9*1,25) / (151,67 + (9*1,25)) = 11,25 / 162,92 = 6,91 % de la rémunération totale. Sa rémunération excède au titre de ce mois de 91,27 € le plafond de 79% du SMIC. Dans ce cas, l’exonération au titre des heures supplémentaires ne s’appliquera que sur 6,91 % de la rémunération excédant 79 % du SMIC, soit 91,27 * 6,91 % = 6,31 €.

Imputation de la réduction de charges sur les heures supplémentaires

Sur quelles cotisations faut-il imputer la réduction ?

La réduction s’impute uniquement sur les cotisations salariales d’assurance vieillesse de base, qu’elles soient dues au titre de la rémunération des heures supplémentaires réalisées et exonérées ou au titre de la rémunération habituelle.

Aucune imputation n’est à réaliser sur les cotisations dues au titre de la retraite complémentaire qui doivent être payées intégralement dans les conditions normales.

Enfin, pour les salariés affiliés à des régimes spéciaux et qui ne cotisent pas d’une part à un régime de retraite de base et d’autre part à un régime de retraite complémentaire, la réduction est imputée sur l’ensemble des cotisations dues à ces régimes spéciaux.

Comment imputer la réduction si les heures supplémentaires d’une période de travail supérieure au mois sont décomptés en une seule fois (par exemple en cas d’annualisation du temps de travail) et donnent lieu à un montant d’exonération supérieur au montant des cotisations d’assurance vieillesse de base ?

Dans le cas général, le montant de la réduction est limité au montant des cotisations d’assurance vieillesse de base dues au titre de l’ensemble de la rémunération, pour le mois considéré.

Cependant, dans le cas où les heures supplémentaires ou complémentaires sont décomptées sur une période supérieure au mois, le montant de l’exonération peut être imputé si nécessaire sur les cotisations dues au titre des périodes d’activité postérieures.

Modalités déclaratives et bulletin de paye

L’exonération doit-elle être affichée sur une seule ligne ou détaillée pour chaque cotisation bénéficiant de l’exonération ?

Le montant correspondant à l’exonération est affiché sur une seule ligne, après les lignes relatives aux cotisations et contributions sociales salariales et patronales.

Règles applicables dans certains territoires outre-mer

A Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, quel taux d’exonération est applicable ?

Comme précisé dans le décret, le taux d’exonération n’intègre que les cotisations d’assurance vieillesse. Ainsi, dans le cas général, il est égal à :

  • 4,77 % pour le territoire de Mayotte, compte tenu du fait que la convention AGIRC-ARRCO ne couvre pas ce territoire. Ce taux évoluera chaque année jusqu’en 2036, compte tenu de la convergence du barème mahorais avec le droit commun ;
  • 10,26 % pour le territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon.

CSG

Les règles de déductibilité de la CSG dues au titre des heures supplémentaires et complémentaires évoluent-elles compte tenu de l’exonération à l’impôt sur le revenu ?

La CSG assise sur les heures supplémentaires et complémentaires exonérées d'impôt sur le revenu est intégralement non-déductible du revenu imposable dans la mesure où ces heures supplémentaires et complémentaires sont à la fois exonérées d’impôt sur le revenu et, en pratique, de cotisations sociales salariales.

Source : INSTRUCTION INTERMINISTERIELLE N° DSS/5B/2019/71 du 29 mars 2019.