Conseil Constitutionnel : rejet de la provision pour risque prud'homal, maintien de l'instance de dialogue social dans les franchises

  • Article publié le 30 août 2016

En dehors de la loi elle-même, prise dans sa globalité, c'étaient pratiquement les deux seules mesures de la loi travail sur lesquelles le Conseil constitutionnel devait se prononcer. Le résultat est plutôt décevant.

Provision pour risque prud'homal

Cette mesure, qui devait s'appliquer dans les entreprises de moins de 10 salariés, prévoyait la possibilité pour les employeurs de constituer, dès l'embauche d'un salarié, une provision déductible du résultat en vue de faire face aux indemnités susceptibles d'être ultérieurement dues à ce salarié en cas de condamnation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Mais selon le Conseil Constitutionnel, cette mesure (ajoutée en fin de parcours par le Gouvernement – ndlr) ne présentait pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans le projet de loi initial. Elle a donc été adoptée selon une procédure contraire à la Constitution et elle a par conséquent été annulée.

Instance de dialogue social dans les réseaux de franchise

Selon l'article 64 de la loi travail, dans les réseaux de franchisés employant au moins 300 salariés en France, lorsqu’une organisation syndicale représentative au sein de la branche dont relèvent ces franchisés le demande, le franchiseur est tenu d'engager une négociation visant à mettre en place une « instance de dialogue social » commune à l’ensemble du réseau.

Cette instance est présidée par le franchiseur, est composée des franchisés eux-mêmes et des représentants des salariés, et elle doit se réunir deux fois par an.

Lors de ces réunions, elle sera informée des décisions du franchiseur de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail ou les conditions d’emploi, de travail et de formation professionnelle des salariés des franchisés.

Elle aura en outre pour mission de formuler, à son initiative, et d'examiner, à la demande du franchiseur ou de représentants des franchisés, toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail, d’emploi et de formation professionnelle des salariés dans l’ensemble du réseau ainsi que les conditions dans lesquelles ils bénéficient de garanties collectives complémentaires.

Considérant que cette mesure créait un lien totalement nouveau entre le franchiseur et les franchisés, constituait une rupture d'égalité par rapport aux autres formes de réseaux commerciaux existant, et portait atteinte aux principes constitutionnels de la liberté d'entreprendre, plusieurs sénateurs et députés avaient déposé un recours à son sujet.

Mais le Conseil constitutionnel a rejeté ces arguments.

Selon les Sages en effet, en imposant aux seuls réseaux d'exploitants liés par un contrat de franchise la mise en place d'une instance de dialogue regroupant les salariés de ces différents exploitants, à l'exclusion des autres formes juridiques de réseaux commerciaux, le législateur a traité différemment des situations différentes.

En effet, les caractéristiques des contrats de franchise conduisent à ce que l'encadrement des modalités d'organisation et de fonctionnement des entreprises franchisées puisse avoir un impact sur les conditions de travail de leurs salariés. Cette différence de traitement est en rapport avec l'objet de la loi tendant à prendre en compte, par la création d'une instance de dialogue social, l'existence d'une communauté d'intérêt des salariés des réseaux de franchise. Par suite, les dispositions adoptées ne méconnaissent pas le principe d'égalité.

Par ailleurs, le Conseil a considéré que cette mesure ne porte pas atteinte à la liberté d'entreprendre.

Néanmoins, il a censuré la disposition selon laquelle, à défaut d'accord entre le franchiseur, les représentants des salariés et ceux des franchisés, les dépenses d'organisation des réunions ainsi que les frais de séjour et de déplacement devaient être mis à la charge du seul franchiseur, au motif que cette disposition portait une "atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre".

Rappelons que la création de cette instance de dialogue social dans les réseaux de franchise n'est pas encore applicable pour le moment. Son entrée en vigueur est en effet subordonnée à la parution d'un décret en Conseil d'Etat qui doit en fixer les modalités d'application.

Source : Conseil Constitutionnel, décision n° 2016-736 DC du 4 août 2016.