Augmentation de capital SARL : les absents n'ont pas toujours tort...

  • Article publié le 26 févr. 2013

Profiter qu'un associé soit bloqué à l'autre bout du monde pour voter une augmentation de capital réduisant sa participation à peau de chagrin... non seulement ce n'est pas très fair-play, mais en plus c'est répréhensible par les tribunaux.

Ainsi, vient en effet de juger la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, condamnant même la société à verser 2.500 € de dommages-intérêts à l'associé spolié en réparation de son préjudice moral.

Il faut dire que, alors qu'il était le fondateur de la société, sa participation dans le capital s'est trouvée d'un seul coup ramenée à moins de 1 % !

L'affaire

Une SARL au capital de 1.000 €, de lourdes pertes au titre d'un exercice, l'augmentation de capital est incontournable.

Le problème est que l'associé fondateur se trouve à l'autre bout du monde pour des raisons professionnelles et qu'il ne pourra donc pas être présent à l'Assemblée Générale Extraordinaire que le Gérant envisage de réunir.

Il lui demande par courriels d'attendre son retour, mais le Gérant passe outre et se contente d'envoyer la convocation à son domicile parisien.

Considérant que l'assemblée avait été régulièrement convoquée, les associés valide l'augmentation de capital, mais l'associé fondateur ne pouvant y participer en raison de son absence, sa part dans le capital se trouve ramenée de 23 à 0,49 %.

De retour en France, il sollicite en justice l'annulation de la délibération et demande la convocation d'une nouvelle Assemblée Générale, en faisant valoir qu'il était en Polynésie à la date de l'assemblée pour raisons professionnelles mais que, pendant cette absence, il avait continué à communiquer avec la société par voie de courriels et avait, en particulier, donné la date de son retour et demandé que l'on attende cette date pour prendre toute disposition juridique ou financière engageant l'avenir de la société.

Les tribunaux

Dans un premier temps, le Tribunal de Commerce de CANNES, dans un Jugement du 08 septembre 2011, rejette sa demande, relevant qu'il avait prolongé son séjour à l'étranger de manière importante (deux mois), qu'il n'était pas établi que ses coassociés connaissaient sa date de retour, et qu'en conséquence il ne pouvait être invoqué que l'Assemblée Générale litigieuse ait été convoquée sciemment afin de lui porter préjudice ou de l'évincer du capital de la société.

L'associé interjette donc appel et bien lui en prend. Car la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence, dans un Arrêt du 13 décembre dernier, a purement et simplement annulé l'Assemblée Générale Extraordinaire ayant décidé du principe et des modalités de l'augmentation de capital, tout en enjoignant la société de réunir régulièrement dans les 6 semaines de la signification de l'Arrêt une nouvelle Assemblée Générale avec le même ordre du jour.

Selon les juges en effet, l'assemblée avait été intentionnellement réunie afin de spolier l'associé puisque la période de souscription était achevée à son retour (dont la date était connue) et la souscription à l'augmentation de capital déjà constatée, ce qui constituait une fraude manifeste justifiant l'annulation de l'Assemblée Générale litigieuse.

Source : Arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 décembre 2012, n° 11-16034.

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