Baux commerciaux : la mensualisation des loyers retardée pour cause de dissolution

  • Article publié le 12 juin 2024

Afin de limiter les sorties de trésorerie liées à la location du local, les bailleurs commerciaux ont signé un accord le 3 juin dernier concernant la mise en place de la mensualisation des loyers. Mais malheureusement, cette amélioration devant être entérinée par la loi, il va falloir attendre encore un peu…

En principe, le loyer d'un bail commercial est librement fixé par les parties dans le contrat. De même, les modalités de paiement, à savoir la périodicité du loyer (mensuel, trimestriel, semestriel, etc.) et le moment de son paiement (à échoir ou à terme échu) ressortent de la liberté contractuelle.

Mais dans la pratique, compte tenu du poids prépondérant des bailleurs dans la négociation, ces derniers exigent le plus souvent un paiement d'avance du loyer et avec une périodicité trimestielle, voire semestrielle parfois. Ces pratiques sont courantes au sein du secteur du commerce.

Ainsi, en début de contrat, puis à chaque échéance, les commerçants sont amenés à verser d'avance trois mois de loyer (voire six mois) et en une seule fois.

En outre, cette contrainte se trouve le plus souvent renforcée par la mise en place d'un dépôt de garantie principalement destiné à garantir le non-paiement éventuel de loyers futurs. Et là encore, l'usage est de prévoir au titre du dépôt de garantie un trimestre de loyers si le terme du loyer est trimestriel et à échoir, et deux trimestres de loyers si le terme du loyer est trimestriel et échu.

Tout ceci impacte bien sûr fortement la trésorerie des entreprises, en particulier des plus petites. Sur la base d'un loyer représentant en moyenne 15 % du chiffre d'affaires annuel, les commerçants locataires astreints à un paiement trimestriel décaissent en moyenne en début de trimestre environ 3,75 % de leur chiffre d'affaires annuel.

C'est la raison pour laquelle, en amont du débat parlementaire qui a débuté cette semaine au Sénat, des fédérations représentatives, d’une part des bailleurs et des investisseurs en immobilier de commerce, et d’autre part des commerçants, ont annoncé le 3 juin dernier la signature d’un accord visant la généralisation de la mensualisation des loyers, mais aussi, en contrepartie, l'accélération du recouvrement des loyers impayés.

Dans le détail, cet accord tient en 4 points :

1 - Mensualisation des loyers

Même si le principe d'une facturation trimestrielle est prévu dans le bail, tout locataire sera en droit de demander à payer son loyer et ses charges mensuellement (sauf dans le cas où il aurait un ou plusieurs termes en retard). Cette demande prendrait effet à compter de la prochaine échéance de paiement du loyer prévue par le bail.

2 - Plafonnement du dépôt de garantie à 3 mois et un meilleur encadrement de ses conditions de restitution

Les sommes payées à titre de garantie par le locataire ne pourront excéder le montant des loyers dus au titre d’un trimestre.

Par ailleurs, lors du départ du locataire, ces sommes devront lui être restituées dans un délai ne pouvant excéder trois mois à compter de la remise en main propre, ou par lettre recommandée avec avis de réception, des clés au bailleur ou à son mandataire, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur, sous réserve qu’elles soient dûment justifiées.

Enfin, en cas de cession du bail, l’obligation de restitution au locataire des sommes payées à titre de garantie sera transmise au nouveau bailleur.

3 - Des délais de paiement sous conditions

En contrepartie des dispositions ci-dessus, les signataires demandent que lorsqu'un juge accorde des délais de paiement à un locataire, ceci ne soit possible que si le locataire est en mesure de régler sa dette locative et qu’il ait repris le règlement des loyers et des charges courants à la date de l’audience.

4 - Encadrement du délai de restitution des clés en cas de liquidation judiciaire du locataire

Les signataires demandent également que le délai de restitution des clés au bailleur par le liquidateur judiciaire, soit plafonné à deux mois.

Dernière minute : une entrée en vigueur retardée pour cause de dissolution

L'entrée en vigueur des dispositions ci-dessus est subordonnée à l'adoption définitive du projet de loi de simplification de la vie économique qui est actuellement en cours d'examen par le Sénat. Or, compte tenu de la dissolution de l'Assemblée Nationale, celui-ci a suspendu ses travaux jusqu'à l'entrée en fonction d'une nouvelle Assemblée.

L'ensemble des mesures ci-dessus est donc dorénavant en suspens (et reste même à la merci d'un rejet par la future nouvelle assemblée le cas échéant).

Source : accord du 3 juin 2024.