Jurisprudence : le cogérant d'une SARL n'est pas nécessairement une caution avertie

  • Article publié le 3 mai 2016

Sous peine d'engager sa responsabilité, un organisme de crédit est tenu d'informer et de mettre en garde une personne qui se porte caution pour un prêt souscrit par une société. Mais qu'en est-il lorsque cette caution est le dirigeant de cette société ?

L'affaire

Une SARL avait conclu quatre contrats de crédit-bail dont le cogérant s'était porté caution solidaire. Arrive le dépôt de bilan et bien évidemment l'assignation en paiement de la caution.

Le cogérant

Non seulement celui-ci refuse de s'acquitter des sommes restant dues, mais demande au contraire la condamnation de la banque à l'indemniser du préjudice résultant pour lui du manquement de cette dernière à son obligation de mise en garde lors de la conclusion des contrats de cautionnement.

Les juges

Dans un premier temps, aussi bien le tribunal de commerce que la Cour d'appel donne tort au plaignant.

Ils considèrent en effet que, compte tenu des fonctions qu'il exerçait au sein de la société, le cogérant ne pouvait raisonnablement soutenir qu'il ne disposait pas des informations nécessaires à l'appréciation de la portée de ses engagements, ni que l'état des comptes de l'entreprise, de ses charges et des engagements financiers, ne pouvaient pas être connus de sa part.

De plus, le cautionnement a été réitéré à plusieurs reprises pour de nouveaux contrats.

La Cour de cassation

Les juges suprêmes, quant à eux, s'en tiennent à une seule règle jurisprudentielle désormais bien établie : il appartient à l'établissement de crédit de démontrer qu'il a rempli son obligation de mise en garde à l'égard de la caution non avertie, au regard de ses capacités financières et des risques de l'endettement né de l'engagement de caution.

Or, en décidant que le cogérant n'apportait pas la preuve de ce qu'il n'avait pas été mis en garde, tandis que c'était à la banque qu'il appartenait de prouver qu'elle s'était assurée de sa capacité financière à faire face à ses engagements et qu'elle l'avait mis en garde sur les risques de l'endettement né de l'engagement de caution, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve.

Ce faisant, elle a donc violé l'article 1315 du code civil selon lequel « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ».

Source : Cour de cassation, chambre commerciale, audience publique du mardi 22 mars 2016, pourvoir n° 14-20216, publié au bulletin.