Le Gérant n'est pas personnellement responsable d'un trouble anormal de voisinage causé par sa SARL

  • Article publié le 4 sept. 2013

Certes, le Gérant personnifie souvent sa société. Mais cela ne signifie pas pour autant que l'un et l'autre doivent être confondus. Une SARL conserve sa propre personnalité juridique et doit assumer elle-même les conséquences de ses éventuelles nuisances.

L'affaire

Le voisin d'une station de lavage automobile exploitée par une SARL, se plaignant des nuisances sonores résultant de l'usage de cette station, avait fait assigner personnellement le gérant de la société (et non pas la société elle-même) en invoquant un trouble anormal de voisinage.

Les juges de première instance

Un rapport d'expertise ayant effectivement mis en évidence que le fonctionnement de la station de lavage générait des bruits d'un niveau supérieur au seuil réglementaire défini par le Code de la Santé Publique, le gérant de la société est déclaré responsable du préjudice subi par son voisin, condamné à l'indemniser et condamné à prendre des dispositions nécessaires à la cessation du trouble sonore.

Le Gérant

Le gérant interjette appel de cette décision, invoquant que l'action engagée contre lui était irrecevable, dès lors que l'activité litigieuse était exploitée par la société et non par lui-même personnellement.

La Cour d'Appel

Relevant notamment que :

  • la station de lavage était bien exploitée par la SARL et non par le Gérant personnellement ;
  • que, en l'espèce, les troubles anormaux de voisinage invoqués étaient uniquement liés à l'activité commerciale exercée par la SARL par le biais des installations lui appartenant, de sorte que cette dernière était seule à pouvoir mettre en œuvre des mesures destinées à mettre fin auxdits troubles anormaux de voisinage et seule tenue à indemnisation du préjudice subi desdits troubles ;

Les juges en tirent la conclusion que le plaignant ne pouvait pas se prévaloir d'un intérêt à agir contre le gérant à titre personnel, dès lors que celui-ci n'avait commis aucune faute détachable de ses fonctions. En conséquence, son action était irrecevable.

Conclusion

Cette décision illustre parfaitement le fait que - on a parfois tendance à l'oublier -, une société immatriculée a sa propre personnalité juridique, son propre patrimoine également, et que l'un et l'autre ne peuvent et ne doivent pas être confondus avec ceux de leur Gérant ou de leurs associés.

Toutefois, il est à noter que cette décision n'a pu être prise par les juges qu'après qu'ils aient constaté que le Gérant n'avait commis "aucune faute détachable de ses fonctions", c'est-à-dire, selon une autre jurisprudence, aucune faute intentionnelle, d'une particulière gravité, et incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions.

Source : Cour d'Appel de Nancy ; arrêt n° 12/00627 du 4 juin 2013.