Amendes pour infractions au code de la route avec un véhicule de société : attention à dénoncer le bon conducteur !

  • Article publié le 28 juin 2023

Lorsqu'une infraction est commise avec un véhicule de société, le Gérant est tenu de dénoncer le conducteur sous peine d'une amende de 3.750 €. Mais encore faut-il être sûr que la personne ainsi désignée était bien celle qui était au volant !

L'affaire

Sa société ayant reçu un avis de contravention pour un excès de vitesse commis avec son véhicule, le Gérant désigne le conducteur, en précisant sa date de naissance, son adresse et son numéro de permis de conduire, comme il y est tenu par le code de la route (voir à cet égard notre fiche pratique : « Amendes pour infractions au code de la route : les modalités de la dénonciation des conducteurs »).

Mais lorsque le salarié ainsi désigné reçoit à son tour l'avis de contravention, il conteste être l'auteur de l'infraction.

Entendu par la gendarmerie, le Gérant indique qu'il avait désigné ce salarié en qualité de responsable du véhicule, et qu'il ne pouvait pas savoir s'il était le conducteur au moment des faits.

Cependant, le résultat reste le même, à savoir que le vrai responsable de l'infraction n'est pas connu.

Sa société est donc citée devant le tribunal de police, pour non-transmission de l'identité et de l'adresse du conducteur du véhicule ayant servi à commettre l'infraction, en application de l'article L. 121-6 du code de la route.

Les juges

En première instance néanmoins, le tribunal relaxe la société, considérant que celle-ci avait bien respecté son obligation de désignation du conducteur, et que la circonstance que le salarié qu'elle a désigné ait contesté être ce conducteur ne permettait pas de retenir l'infraction à son encontre.

Mais cette décision n'a pas du tout satisfait le ministère public puisque, d'une part, la faute restait impunie et l'amende restait impayée, d'autre part, elle pouvait permettre à l'avenir à tout salarié désigné par son employeur d'échapper à la contravention en affirmant qu'il n'était pas le conducteur.

L'officier du ministère public forme alors un pourvoi contre cette décision et, grand bien lui en a pris puisque la Cour de cassation casse et annule ce premier jugement.

Selon elle en effet, l'obligation de désignation du conducteur s'entend d'une désignation certaine pouvant être corroborée par des éléments probants. Or, le Gérant a indiqué lors de son audition qu'il ne pouvait savoir qui était le conducteur au moment des faits, que son entreprise ne tenait pas de registre des conducteurs, et qu'il ne pouvait donc pas fournir d'éléments probants sur l'auteur de l'infraction.

Dès lors, la décision des juges est implacable : le représentant légal qui désigne un tiers sans disposer d'éléments probants ne satisfait pas aux exigences de désignation du conducteur prévues par le code de la route.

L'affaire doit donc être rejugée !

Moralité : il ressort de cet arrêt que le représentant légal d'une société doit toujours savoir avec certitude qui est au volant d'un véhicule de sa société. Il en résulte que si ce véhicule peut être utilisé indifféremment par plusieurs salariés, il serait certainement utile de mettre en place un système d'enregistrement préalable, une sorte de "registre des utilisateurs", que chacun serait tenu de signer avant de prendre possession du véhicule. Ce dispositif devant en outre être accompagné d'une interdiction de prêter le véhicule à un tiers.

Source : Cour de cassation, criminelle, chambre criminelle, 6 juin 2023, pourvoir n° 22-87.212, publié au bulletin.