Réforme du travail : les 12 points clés du projet de loi

  • Article publié le 23 févr. 2016

Près de 400 articles en passe d'être modifiés, 60 supprimés, 160 ajoutés... c'est un véritable séisme que s'apprête à subir notre code du travail. Qu'en restera-t-il après de nombreuses semaines de débats, de pétitions et de manœuvres politiques en tout genre, nous verrons bien. En attendant, voici les 12 principales mesures envisagées...

1 - Licenciement abusif : les indemnités prud'homales plafonnées

En cas de licenciement abusif, l'employeur condamné aux prud'hommes doit verser au salarié des indemnités (en plus de l'indemnité de licenciement proprement dite). Celles-ci seraient plafonnées selon le barème suivant (applicable quel que soit la taille de l'entreprise) :  

  • 3 mois de salaire pour un salarié avec une ancienneté inférieure à deux ans,
  • 6 mois de salaire pour une ancienneté d'au moins deux ans et de moins de cinq ans,
  • 9 mois de salaire pour une ancienneté d'au moins cinq ans et de moins de dix ans,
  • 12 mois de salaire pour une ancienneté d'au moins dix ans et de moins de vingt ans,
  • 15 mois de salaire pour une ancienneté d'au moins vingt ans.

Selon le Gouvernement, ces plafonds sont "tout à fait en phase avec les moyennes des indemnités actuellement prononcées par le juge".

En outre, ce plafonnement des indemnités ne s’appliquera pas aux cas particulièrement graves de licenciements abusifs, par exemple en cas de discrimination, de harcèlement, ou encore d’absence de plan de sauvegarde de l’emploi en cas de licenciement collectif.

2. Le licenciement économique défini par la loi

Actuellement, ce sont les juges aux prud'hommes qui entérinent, ou non, le caractère économique d'un licenciement.

Selon le projet de réforme, les critères à prendre compte pour déterminer le motif économique d'un licenciement seraient clairement inscrits dans le code du travail. Ainsi, constituerait un licenciement économique le licenciement consécutif à :

  • la cessation d'activité de l'entreprise,
  • des mutations technologiques,
  • une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité,
  • des difficultés économiques caractérisées soit par une baisse de commandes ou du chiffre d'affaires pendant plusieurs trimestres consécutifs en comparaison avec la même période de l'année précédente, soit par des pertes d'exploitation pendant plusieurs mois, soit par une importante dégradation de la trésorerie, soit par tout élément de nature à justifier de ces difficultés.

Un accord de collectif de branche fixerait la durée de la baisse de commandes ou du chiffre d'affaires en question (pas en-dessous de deux trimestres consécutifs, toutefois) ou des pertes d'exploitation (sans aller en-dessous d'un trimestre).

En cas d'absence d'accord de branche, ces durées seraient respectivement de quatre trimestres consécutifs pour la baisse de chiffre d'affaires, et d'un semestre pour les pertes d'exploitation). 

3 - Des dérogations aux 35 heures

La durée hebdomadaire légale du travail resterait fixée à 35 heures, et les durées maximales de travail à 10 heures par jour et 48 heures par semaine.

Toutefois, en cas de circonstances exceptionnelles, la durée maximale hebdomadaire pourra, pour une durée limitée, être portée à 60 heures au lieu de 48, et la durée maximale quotidienne à 12 heures au lieu de 10, mais uniquement sur autorisation de l’inspecteur du travail.

4 - La rémunération des heures supplémentaires remaniée

Comme aujourd'hui, toute heure de travail effectuée au-delà de 35 heures par semaine devra faire l'objet d'une rémunération majorée.

Toutefois, les entreprises serait désormais autorisées à fixer elles-mêmes, par accord collectif, le taux de majoration applicable. Celui-ci pourrait même être inférieur au taux fixé par la branche, mais il ne pourrait en aucun cas être inférieur à 10 %.

En l'absence d'accord collectif en revanche, les taux légaux actuels continueraient de s'appliquer, à savoir 25 % pour les huit premières heures, 50 % au-delà.

5 - Possibilité de conclure des forfaits jour sans accord collectif

Le forfait-jour est un régime dérogatoire aux 35 heures qui permet de rémunérer des salariés en fonction du nombre de jours travaillés par an et non en fonction d'horaires hebdomadaires.

Mais aujourd’hui, pour pouvoir recourir à ce dispositif, l’entreprise doit être couverte par un accord collectif.

Alors que, selon le projet de loi, il deviendrait possible, pour les PME de moins de 50 salariés, de passer des conventions de forfait individuelles (en jours ou en heures). Cependant, l’accord du salarié sera indispensable et toutes les garanties déjà prévues en cas de forfait (notamment le suivi régulier de la charge de travail) s’appliqueront.

6 - Autorisation d'accords de maintien dans l'emploi "offensifs"

Une entreprise en bonne santé aurait le droit de passer un accord collectif "conclu en vue de la préservation ou du développement de l'emploi" - par exemple pour honorer une nouvelle commande - et de l'imposer aux salariés, à condition que cela ne baisse pas leur rémunération.

L'accord prévaudrait donc sur leur contrat de travail. Le salarié qui refuserait de travailler pourrait faire l'objet d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse

7 - Le repos pour période d'astreinte modifié

Aujourd’hui, lorsqu'un salarié est amené à intervenir pendant son astreinte, l’employeur est tenu de lui octroyer 11 heures de repos consécutives à l’issue de son intervention, y compris s’il avait déjà bénéficié d’une partie de son repos avant son intervention.

Selon le projet de loi, lorsque le salarié interviendra pendant son astreinte, le temps de repos qu’il avait déjà pris avant d’intervenir sera pris en compte pou le calcul des 11 heures de repos.

8 - Des accords d'entreprise soumis à référendum

Actuellement, pour qu'un accord conclu avec les salariés soit valide, il doit recueillir la signature de syndicats ayant recueilli au moins 30 % des voix aux dernières élections professionnelles, et ne pas susciter l'opposition de syndicats ayant recueilli 50 % des voix aux dernières élections.

Selon le projet de loi, les accords collectifs devront être majoritaires. Mais afin d'éviter des situations de blocage, des syndicats représentant au moins 30 % des salariés pourront demander une consultation des salariés. Et un accord sera valide s'il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.

9 - Mise en place du Compte Personnel d'Activité

Le compte personnel d'activité serait mis en place à partir du 1er janvier 2017. Il serait ouvert à toute personne âgée d'au moins 16 ans occupant un emploi, ainsi qu'à tout demandeur d'emploi et également aux non salariés.

Ce dispositif permettra de financer plus facilement des formations, ou d’être accompagné dans un projet de création d’entreprise.

Chaque titulaire conservera les droits inscrits à son compte, y compris quand il changera d’employeur ou de statut au cours de sa vie professionnelle. 

10 - Des accords type de branche pour les PME

Les entreprises de moins de 50 salariés ayant du mal à passer des accords collectifs en l'absence d'institutions représentatives du personnel, pourraient appliquer des accords type concoctés au niveau des branches, à leur intention.

L'employeur pourrait appliquer ces accords type à travers un document unilatéral indiquant les stipulations qu'il aurait retenues.  

11 - Le contrat de professionnalisation assoupli

Comme le voulait le Medef, à titre expérimental, jusqu'au 31 décembre 2017, des contrats de professionnalisation très souples pourraient être conclus entre des entreprises et des demandeurs d'emploi, notamment les moins qualifiés et les plus éloignés du marché du travail.

12 - Suppression de la visite médicale d'embauche systématique

Le projet de loi réforme le suivi des salariés par la médecine du travail pour mieux cibler les salariés exposés à des risques particuliers. Il supprime ainsi la visite médicale d’aptitude systématique à l’embauche, sauf pour certains postes à risques.

Par contre, il renforce le suivi personnalisé des salariés tout au long de leur carrière, en reconnaissant ce droit aux salariés intérimaires et titulaires de contrats courts.  

Source : Ministère du travail