Le recours à un prestataire en portage salarial est désormais encadré par le Code du travail

  • Article publié le 13 avr. 2015

Le Code du travail vient de prendre encore un peu plus d'embonpoint. Une ordonnance vient en effet d'y ajouter les conditions d'exercice de l'activité de portage salarial, les droits des salariés portés, et les conditions de recours à cette forme de collaboration par les entreprises clientes.

Le portage salarial : qu'est-ce que c'est ?

Le portage salarial est une solution pour les personnes qui souhaitent proposer leur expertise ou leurs services à des tiers, en toute autonomie, mais sans pour autant avoir à se déclarer comme prestataire indépendant, auto-entrepreneur ou professionnel libéral, ni à se lancer à corps perdu dans la création d'une société.

Le principe consiste pour ces personnes à se faire engager par une entreprise de portage salarial. Celle-ci leur accorde un contrat de travail – ce qui leur permet de bénéficier du régime des salariés – tout en les laissant agir comme de véritables indépendants auprès de leurs clients, et en se rémunérant sur le montant des honoraires encaissés.

Lancé à la fin des années 80, le portage salarial s'est largement développé depuis et intéresse de nombreuses catégories sociales :

  • les cadres qui souhaitent exercer à titre indépendant tout en continuant à bénéficier du régime des salariés ;
  • les anciens dirigeants ou les retraités qui souhaitent partager leur expérience,
  • les femmes qui souhaitent gérer leur vie de travail en toute compatibilité avec leur engagement familial,
  • les personnes qui veulent vivre un rapport au travail plus autonome,
  • les auto-entrepreneurs qui souhaitent aller au-delà des limites qu'impose ce statut sans pour autant se lancer dans la création d'une entreprise.

Cependant, cette forme de collaboration n'en était pas moins considérée jusqu'ici comme illicite.

D'où cette ordonnance, qui vient d'être publiée au Journal Officiel et qui, désormais, encadre aussi bien les conditions d'exercice de l'activité de portage salarial, les conditions d'exercice des « salariés portés », et les conditions de recours à ces salariés portés par les entreprises clientes.

Conditions d'exercice de l'activité de portage salarial

L'activité de portage salarial ne peut être exercée par une entreprise qu'après déclaration faite à l'autorité administrative et obtention d'une garantie financière qui permet d’assurer, en cas de défaillance de cette entreprise, le paiement des salaires et des cotisations obligatoires y afférentes

En outre, seule une entreprise de portage salarial peut conclure des contrats de travail en portage salarial, et cette activité doit être exercée à titre exclusif par cette entreprise.

Par ailleurs, l'entreprise de portage salarial doit conclure avec l'entreprise cliente du salarié porté un contrat commercial de prestation de portage salarial au plus tard dans les 2 jours ouvrables suivant le début de la prestation, et ce contrat doit contenir les éléments essentiels de la négociation de la prestation, éléments qui sont fournis par le salarié porté.

Enfin, une copie de ce contrat doit être transmise au salarié porté.

Le statut du « salarié porté »

Le salarié porté doit justifier d'une expertise, d'une qualification et d'une autonomie qui lui permettent de rechercher lui-même ses clients et de convenir avec eux des conditions d'exécution de sa prestation et de son prix.

L'entreprise de portage n'est pas tenue de fournir du travail au salarié porté.

Par contre, elle est tenue de lui fournir un contrat de travail et de lui assurer une rémunération mensuelle minimale :

Contrat de travail

Le contrat de travail conclu entre l'entreprise de portage salarial et le salarié porté peut être un CDD ou un CDI. Il doit être obligatoirement écrit et doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires.

S'il s'agit d'un CDD, le contrat doit en principe comporter un terme fixé avec précision dès sa conclusion. Toutefois, il peut ne pas comporter de terme précis lorsque le terme de l'objet pour lequel il a été conclu n'est pas connu. Il est alors conclu pour une durée minimale et il a pour terme la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu.

Par ailleurs, ce CDD est renouvelable une fois pour une durée déterminée, mais sa durée totale ne peut excéder 18 mois, renouvellement inclus. Toutefois,  afin de permettre au salarié porté de prospecter de nouveaux clients, le terme du contrat peut être reporté par accord entre l'entreprise de portage salarial et le salarié porté pour une durée maximale de trois mois.

Rémunération

Le salarié porté bénéficie d'une rémunération minimale définie par accord de branche étendu. Mais faute d'un tel accord, le montant de cette rémunération minimale ne peut être inférieur, mensuellement et pour une activité à temps plein, à 75 % de la valeur mensuelle du plafond de la sécurité sociale (soit 2.377,50 € par mois en 2015).

Les conditions du recours à un salarié porté par les entreprises clientes

L'entreprise cliente ne peut avoir recours à un salarié porté que pour l'exécution d'une tâche occasionnelle ne relevant pas de son activité normale et permanente, ou pour une prestation ponctuelle nécessitant une expertise dont elle ne dispose pas.

En outre, la durée de cette prestation ne peut excéder 36 mois.

Par ailleurs, la prestation du salarié porté dans l'entreprise cliente ne peut avoir pour objet :

  • ni de remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu à la suite d'un conflit collectif de travail ;
  • ni d'effectuer certains travaux particulièrement dangereux figurant sur la liste prévue à l'article D. 4154-1 (ex : amiante, agents chimiques, poussières, rayons ionisants, désinsectisation des bois, etc.) sauf autorisation de la DIRRECTE  ;

Enfin, les activités de services à la personne ne peuvent faire l'objet d'un contrat de travail en portage salarial.

Source : Ordonnance n° 2015-380 du 2 avril 2015, J.O. du 3.